Dewoitine D 520
GC II/3  4e escadrille  06/1940




Le D 520 est sans contestation, le chasseur le plus performant mis en oeuvre par l'Armée de l'Air en mai-juin 1940.

Malheureusement, ce qui caractérise son entrée en opération se résume à ces quelques mots: « trop peu, trop tard… . »

Au même titre que le Mirage III, ou encore le Spad XIII de la Grande Guerre, on peut considérer qu'il est l’une des plus belles réussites de l'aéronautique française, en terme de chasseur.


La Société d’Emile Dewoitine avait déjà fourni des chasseurs pour l’Armée de l’Air lorsque, sur sa propre initiative, elle lança en 1936 l’étude d’un nouvel appareil moderne.

Il s’agissait de produire un concurrent aux prototypes britanniques (Spitfire et Hurricane),  et d’égaler les performances du chasseur allemand Messerschmitt Bf. 109.

Le but était d’atteindre les 520 km/h (d’où le nom de l’appareil).


Après de nombreuses péripéties, le premier prototype décolle en octobre 1938. Les débuts sont difficiles et le développement du projet prend du retard, mais les appareils concurrents sont dans le même cas.

Une première commande est passée en mars 1939, mais ce n’est qu’en avril 1940 que le premier groupe de chasse devient opérationnel sur cet appareil.

 

La cellule a été étudiée pour recevoir un moteur Hispano Suiza de 1200 CV, mais celui-ci n’est pas encore au point. L’avion est finalement équipé d’un moteur de 935 CV.

Sa puissance est donc inférieure de 200 CV à son principale adversaire, le Bf.109 E, à qui il rend quarante km/h à basse altitude.

En revanche, et grâce à son compresseur, cela n’est plus le cas au-dessus de 5000 m, là où le D 520 a un net avantage en vitesse ascensionnelle.


Cette relative sous motorisation permet néanmoins d’envisager un potentiel important de développement.

La vitesse maximum de 529 km/h est atteinte à 4000 m. Aux essais, on enregistre en 1939 une vitesse en piqué de 825 km/h.

L’autonomie est de 998 km et le plafond pratique de 11 000 m.

Comme pour le MS 406, l’armement est composé d’un canon axial de 20 mm et de deux mitrailleuses de 7,5 mm dans les ailes.



L’avion est un “pur-sang”, plus difficile à piloter qu’un MS 406 ou un Curtiss H75, il reste cependant plus maniable que le Messerschmitt 109.

Surtout,  sa robustesse et sa cellule élancée, lui permettent d’être plus performant en piqué, situation où il surclasse de manière définitive tous ses opposants.

D’après un certain nombre de pilotes français, un Bf.109 qui s’enfuyait en piqué, pouvait alors être considéré comme perdu.

Ainsi et malgré un nombre réduit d’appareils engagés, et sur une courte période de trois mois, le palmarès de ce chasseur se monte à environ 108 victoires sûres, contre la perte d’une trentaine en combat aérien.

 

La maquette représente un avion (n° 208) de la 4e escadrille du Groupe de Chasse (GC) II/3,  en juin 1940.

Ce groupe est le second à être équipé du nouvel appareil, et il entre en opération le 19/05/1940.

Il est alors essentiellement basé à Bouillancy (60) et à La Ferté Gauché (77).

Deux hommes semblent l’avoir généralement piloté: l’adjudant-chef Bouton et le sergent Robert Killy.

Ce dernier est en fait le père de notre champion olympique de ski: Jean-Claude Killy.


Sur cette période, Robert Killy est crédité de trois victoires aériennes.

Le 21/05 à 14h15, il fait partie d’une patrouille de six avions se dirigeant sur Soissons.

Des éclatements d’obus de DCA signalent une quinzaine de bombardiers ennemis, qui sont escortés par une vingtaine de Messerschmitt Bf.110.

Les Dewoitine passent à l’attaque malgré leur infériorité numérique.

Le sous-lieutenant Codet et Robert Killy concentrent leurs tirs sur un Dornier 17 du dernier peloton.

Le bombardier tombe finalement en flamme dans la forêt de Villers-Cotterêts.  Ils sont alors attaqués par des Bf. 110 mais parviennent à se dégager.

Ils s’en prennent  ensuite à un Heinkel 111, auquel ils causent de graves dégâts, mais à court de munitions, ils doivent rompre le combat.

Un autre Dornier 17 et deux Bf. 110 seront  abattus par leurs équipiers lors de cet engagement.

 

Le 22/05, le sergent Killy fait partie du dispositif qui intercepte une importante formation de bombardiers en piqué Junkers 87 « Stuka ».

C’est alors la ruée sur ces derniers qui s’apprêtaient à passer à l’attaque.

Huit Ju 87 tombent, dont un est attribué au Sgt Killy.

Le 24/05, il participe à une patrouille de protection de bombardiers Martin 167F.

Apercevant des Do 17, le groupe passe à l’attaque.

Malgré l’intervention des Messerschmitt 109, la patrouille de Killy parvient à isoler un Do 17 qui est ensuite  achevé près d’Aulnoy.

Le 08/06, notre homme  est encore présent dans une attaque sur un important dispositif de Stuka, mais il n’est crédité que d’une victoire probable.

A partir du 11/06, les terrains vont se succéder en raison de la débâcle.

L’appareil n°208 fait toujours partie de l’effectif lorsque l’armistice surprend le groupe, alors replié en Algérie.

Du 19/05 au 25/06, le GC II/3 comptabilise plus de trente victoires sur D 520, en contre-partie de onze pertes en combat aérien.


Le groupe va ensuite intervenir en Syrie, en juin et juillet 1941, mais cette fois contre les anciens alliés britanniques. Quatre nouvelles victoires seront alors homologuées à l’unité.

Le 1er juillet 1941, le sergent-chef Killy effectue une mission de reconnaissance, avec le capitaine Boillot. Au-dessus de l’objectif, ils sont coiffés par quatre Hurricane du n° 127 Squadron.

Le Flight Lieutenant Cremin “plombe” l’appareil de Killy ,qui est blessé au bras et au cou par des éclats de sa verrière. Il réussit cependant à revenir à Alep, où il cale son avion en bout de piste.

Sur ce théâtre d’opération,  le D 520 conserve la maîtrise dans les airs, mais c’est en clouant l’aviation française au sol, par des bombardements et mitraillages répétés, que les Anglais et les Australiens, obtiennent finalement la supériorité aérienne.

Ainsi, si le groupe enregistre une perte en combat aérien, c’est six appareils qui sont détruits au sol, dont justement le n° 208, qui termine là sa carrière.

 

Sources:

“GC I/3, les Rois du Dewoitine 520 “,  Bernard Philippe (hors-série n° 14 de la revue “Avions”),

“Le Dewoitine D 520”, CJ Ehrengardt  (hors-série n° 8 de la revue “Aéro Journal”),

“Les Ailes de Gloire n° 8: le Dewoitine 520”, Patrick Marchand et Junko Takamori (Editions d’Along),

“L’aviation de chasse française 1918-1940”, Jean Cuny et Raymond Danel (Editions Larivière),

Divers n° des revues “Avions” et “Batailles Aériennes”.