Potez 631 (suite)
ECN 1 /13    05/1940
L'ECN 1/13 à Moissy Cramayel


C'est une période assez peu traitée par les articles sur le sujet, peut-être du fait qu'il n'y a eu aucune victoire d’enregistrée.

C'est pourtant durant cette phase, que les hommes de l’escadrille vont faire preuve d'abnégation et du plus grand courage.

Elle est restée dans les mémoires des protagonistes comme étant particulièrement pénible.

En premier lieu,  le manque de personnel commence à se faire sentir.

Malgré les demandes incessantes, l’escadrille ne reçoit toujours pas de renfort.

Cependant elle est enfin équipée avec des avions à armement renforcé, mais il faut les convoyer au Bourget et effectuer l'échange.

Ainsi seuls trois avions de ce type semblent avoir été réceptionnés.

En même temps, les pilotes doivent assurer les patrouilles de couverture et surtout, une nouvelle mission particulièrement dangereuse: le guet au bombardement.

Pour palier aux déficiences des services de guet et d'écoutes terrestres, les Potez sont envoyés seuls sur la ligne de front, afin de prévenir par radio l'arrivée des formations ennemies.

Comme celles-ci sont évidemment précédées de leur escorte, ils se retrouvent alors isolés et assaillis par un essaim de chasseurs allemands. Dans ce cas, il ne reste  plus qu'une seule solution: le "Sauve qui peut"!. Les pertes deviennent donc plus nombreuses.

 
Déjà le 30/05, l'équipage Post/Boutillon/Dobsik est attaqué par un Bf 109 mais parvient à s'échapper en vol rasant.

Le 02/06, c'est la DCA amie qui tire sur l'équipage Post/Boutillon/Giloux.

L'avion est atteint dans les plans, il échappe ensuite à une patrouille de huit Bf 109 qui passe sans le voir, et rentre finalement à bon port.

Le sergent chef Post, pilote, est néanmoins blessé.

Le 03/06 malheureusement, l'ECN 1/13 va enregistrer ses premiers et seuls tués en combat aérien.

La Luftwaffe déclenche ce jour là l'opération "Paula", visant les aérodromes de la région parisienne.

En mission de guet, le S/Lt Biger (pilote), l'A/C Gobert (mitrailleur) et le Sergent Duffour (Radio) sont descendus en flamme, assaillis par 6 Bf 109.

Dans les mêmes conditions, l'équipage Boursain/Jobard/Dobsik parvient quant à lui à s’échapper au ras du sol, poursuivi par cinq Bf 109.

Un troisième équipage: Merle/Sannier/Pelletier,  est tout d'abord tiré par la DCA alliée, puis par les troupes au sol près de la Ferté s/s Jouarre.

S'ensuit une rencontre avec sept Bf 109 dont il échappe en s'enfuyant dans les nuages.

Il en ressort, pour se retrouver face à un Bloch 152 français qui ouvre aussitôt le feu !

Par miracle,  l'avion parvient néanmoins à rentrer à sa base.

A son retour, le S/Lt Merle indiquera que c'est encore les Messerschmitt qui lui ont semblé les moins agressifs !

 
Le 17/06, ordre est donné aux unités sur Potez, de rejoindre le terrain des Milles, près d'Aix en Provence.

Le renfort d'un pilote de réserve, le sergent Favard, permet de rapatrier cinq avions, mais trois seront détruits au sol.

Les conditions météos défavorables empêchent ensuite la réalisation des opérations demandées. Contrairement à nombres d'unités, celles sur Potez restent en France, elles s'installent le 20/06 sur le terrain de Nimes Garons.

L'ECN 1/13 y retrouve son échelon roulant, qui a traversé la France tant bien que mal.

La boucle est bouclée le 23/06, avec une ultime mission d'attaque au sol, réalisée dans des conditions atmosphériques défavorables par sept Potez.

Un seul avion de l'escadrille 1/13 parvient à s'extirper de la boue du terrain.

L'entrée en vigueur de l'Armistice met un terme à cette "aventure".


Certes, le palmarès de l'ECN 1/13 peut paraître marginal, avec trois victoires homologuées et deux probables, sachant qu'il a été réalisé sur seulement  quatre jours.

C'est pourtant le meilleur palmarès de la chasse de nuit.

Sur ce même avion, la F1C de l'aéronavale enregistre douze victoires confirmées mais elle a été engagée plus tôt et au plus proche des combats.

Les raisons de ce manque d’efficacité sont diverses. C’est autant un problème de matériel, qu’une organisation défaillante de l'Armée de l’Air, sans compter les mauvaises conditions dans lesquels les missions sont réalisées. Enfin il faut noter le manque chronique de personnel pilote: malgré les demandes continuelles du chef d'unité, c'est bien neuf pilotes qui manquaient à la 1/13, au plus fort des opérations.

 

La bordure sud du terrain occupée maintenant par un lotissement

Les lances bombes ventraux étaient utilisés uniquement pour des bombes éclairantes Michelin.

On distingue facilement les 2 versions du Potez aux motorisations différentes, par la prise d'air du radiateur d'huile: sur le dessous du capot moteur pour le 631, au dessus pour le 630.

Sources:

Revue “Air Magazine” n°16 à 18,

“Les Ailes Françaises 1939-1945”, Arnaud Prudhomme,  n° 1 à 3,“

Le Potez 630,631,633”, CJ Ehrengardt ,(hors-série n° 8 de la revue “Aéro Journal”),

“Les Ailes de Gloire n° 9: les Potez 63” ,Patrick Marchand et Junko Takamori (Editions d’Along),

“L’aviation de chasse française 1918-1940”, Jean Cuny et Raymond Danel (Editions Larivière),

Revue Aviation Française Magazine n° 12,

Archives du Service Historique de la Défense.

A cette époque, le bourg de Moissy se limitait à une avenue entourée de maisons, et de grandes fermes alentours.

L'hébergement chez l'habitant étant la règle, la troupe était cantonnée à la ferme de Lugny, située à moins d'1 km.

Le 04/06 des mesures sont prises pour protéger le terrain,  en cas d'attaque de parachutistes.

Les équipages demeurent donc près des avions de 3h30 à 21h00.

Le 05/06, la mutation du capitaine Pelleray ne laisse plus que quatre pilotes à l'escadrille: le Cne Treillard, les S/Lt Boursain et Merle et le S/C Post.

Ce jour voit la reprise des missions de couverture, mais cette fois en collaboration avec d'autres escadrilles.

En organisant des formations en patrouilles doubles ou triples , on espère tenir en respect la chasse allemande.

Pourtant jusqu'au 10/06, l'ennemie se dérobe.

Cependant, la pénurie de pilote, alliée à la cadence infernale des missions qui s'enchaînent, commencent à épuiser sérieusement hommes et matériels.


C'est presque un soulagement quand le 11/06, un repli est ordonné sur le terrain de Saumeray (Eure et Loir).

Les pilotes restants sont obligés de faire la navette en voiture, pour récupérer tous leurs avions.

Les reculs successifs en Vendée, puis en Charente Maritime, occasionnent des problèmes de logistique.

Le manque de ravitaillement en essence empêche la réalisation des missions de jour.

Le Potez était équipé d'une antenne supplémentaire déployée et laissée pendante durant le vol (visible sous la cocarde).

Le Terrain de Moissy Cramayel


Impossible de conclure sans parler de ce qui a motivé le montage de ce kit.

Depuis que j'ai su qu'un terrain d’aviation, situé sur ma ville, avait abrité une escadrille de chasseur, je me suis toujours posé la question sur sa situation.

Après une visite aux archives de la Défense, qu'elle ne fut pas ma surprise de découvrir que l'endroit était à proximité de ma maison, voir à quelques centaines de mètres.


Les photos montrent l'état actuel de l'endroit, le paysage a été récemment modifié par des levées de terre, isolant la Francilienne.

La végétation en mai juin 1940 devait cependant être assez proche de ce que l'on peut voir actuellement. Cela ne laissait que peu de possibilité de camouflage.

Suffisamment cependant, car les deux escadrilles présentes ne devaient pas représenter plus d'une quinzaine d'avions.


Le sol étant imperméable, seule la situation sur une légère butte permettait un minimum de drainage.

Le terrain était situé à l'Est de la ferme de Chanteloup, visible sur cette photo dont la vision est orientée Nord Est.